Situé à mi-chemin entre la Suisse alémanique et la Lombardie, le Tessin est le seul canton de Suisse où l'italien est la seule langue officielle. La constitution cantonale du Tessin revendique la mission historique de représenter la culture et la langue italiennes au niveau fédéral. La culture devient ainsi un enjeu politique important, unique en Suisse, et sert de vecteur de légitimité politique et de reconnaissance d'une identité aux héritages historiques complexes. Elle permet également de comprendre l'application du concept de "soft power" dans le contexte d'une région linguistique et d'une situation politique locale spécifique, celle d'une minorité linguistique et culturelle, et d'en retracer l'évolution au cours de l'histoire cantonale.

Au moment de sa fondation en 1803, le canton du Tessin a été confronté à des tensions considérables, alimentées par son statut de région pauvre, fragmentée et périphérique. Ce n'est qu'au début du XXIe siècle que l'on peut observer une véritable stratégie dans le domaine culturel au niveau des villes, avec des efforts pour construire une identité locale et un positionnement compétitif par rapport au tourisme et à l'économie. Au cours de cette période, le Tessin a été soumis à des forces centrifuges. Les tensions avec la Suisse alémanique et la montée du fascisme en Italie ont conduit à la définition d'un cadre d'intervention dans le domaine culturel, centré sur la valorisation des identités locales. La politique culturelle cantonale a ainsi été conçue dès le départ comme un instrument de soft power destiné à la population tessinoise, aux autres cantons, à la Confédération et à l'Italie voisine.

L'étude de Sébastien Peter montre une persistance marquée de cette orientation jusqu'à aujourd'hui. Dans un article de l'hebdomadaire La Domenica du 4 février 2024, à propos de cette étude, l'auteur souligne : « Les instruments de soutien aux actrices et acteurs culturel·les hors des secteurs institutionnels sont rares et peu structurés » et il ajoute : « Après avoir développé un solide réseau d'institutions culturelles au cours des dernières décennies (...) le Tessin devra relever un nouveau défi culturel majeur, comme ailleurs en Suisse, pour développer un soutien clair et structuré aux artistes indépendant·es actuel·les sur le territoire ». A bon entendeur.

Félicitations à Peter pour participer à mieux comprendre les origines des politiques culturelles tessinoises, y compris la situation actuelle, en soulignant ses mérites mais surtout ses lacunes, et en proposant des solutions.

*Sébastien Peter - est un spécialiste du domaine culturel avec une expérience professionnelle significative dans diverses organisations managériales culturelles au Tessin et en Suisse. Il est actuellement directeur des services culturels de la Ville de Locarno et de ses musées.

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